A l’ensemble de nos politiques passés, actuels, et à venir…

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Madame, Monsieur,

A l’heure où les primaires ont envahi nos vies à l’approche de l’échéance des élections présidentielles, je suis quant à moi perplexe sur l’avenir que nous comptons offrir à nos enfants et petits-enfants, et je souhaiterais savoir quelles sont vos intentions vis à vis de l’enfance handicapée –les plus vulnérables de vos concitoyens-.

En effet, avant de voter, j’ai besoin de savoir à qui je donne ma voix. Et c’est également le cas pour nombre de familles concernées par le handicap.

Les élections présidentielles approchent, et chacun bat la campagne (sans mauvais jeu de mots !) afin de se montrer et se faire entendre ; mais dans toutes les actions « d’éclat », dans tous les « bains de foules » que j’ai pu voir, je n’ai curieusement entendu personne dans le monde politique s’élever en faveur de cette partie de la population. Les enfants, quels qu’ils soient, sont pourtant l’avenir d’un pays, sa future force vive, et chacun doit y trouver sa place.

Et c’est justement à propos de place, que je souhaite vous entretenir.

A ce jour, la petite enfance handicapée est prise en charge au sein de CAMSP, IME, SSEFS, SESSAD(*). La population de ces enfants augmente dramatiquement d’année en année, et on sait que la précocité de la prise en charge est un enjeu majeur de santé publique.  Et je veux croire que vous êtes conscient que notre pays est loin d’avoir la capacité d’accueil et de prise en charge de ces familles, et que vous n’ignorez pas non plus qu’une prise en charge la plus précoce possible augmente les chances d’inclusion de ces enfants différents dans un cursus scolaire et une activité professionnelle dignes auxquels ils ont droit.

Aussi :

  • Trouvez-vous normal qu’une famille doive attendre une place en établissement en moyenne 6 mois, voire plus lorsqu’il s’agit d’autisme et de Troubles Envahissants du Développement ? à moins que la Belgique reste une solution incontournable et, lorsque la famille n’en a pas les moyens, que l’enfant reste au domicile avec des aidants qui sont rapidement au bout de leurs forces.
  • Trouvez-vous normal que la création de places dépende du bon vouloir de l’ARS, qui comme chacun le sait gère un budget de plus en plus serré et de ce fait rechigne à lancer des appels à projets pour la création/extension d’instituts ? Lesquels « appels à projets » se concèdent souvent au « moins disant » ; l’attribution se faisant sur la base de critères budgétaires au mépris du contenu et de la qualité de la prise en charge proposée. La « convergence budgétaire » rencontre ici sa limite et les ARS seraient bien les premières institutions ou entreprises à faire mieux pour moins cher.
  • Trouvez-vous normal que de plus en plus de familles aient recours à la Belgique, avec tous les déchirements que les séparations peuvent générer, avec toute la fatigue que cette expatriation entraîne ? Et avec toutes les conséquences sur les capacités des enfants qui sont par cet éloignement privés du soutien de leurs familles, alors que ce soutien familial est également un enjeu majeur de santé publique
  • Et trouvez-vous normal que les prises en charge effectuées par la Belgique soient payées par la Sécurité Sociale française pour des sommes assez vertigineuses, alors que ces mêmes sommes pourraient être utilisées à la création de centres en France, ce qui reviendrait nettement moins cher, pour ne parler que de ce côté trivial de la chose ?

Je suis très concernée par le sujet de l’enfance handicapée dans mon pays ; les enfants n’ont d’autre choix que celui d’aller où on leur dit d’aller et de subir ce qu’on leur impose. Ils sont pourtant l’avenir de notre pays et quel que soit leur état de santé, ils ont tous quelque chose à nous apporter.

A commencer par leur courage, dont beaucoup d’entre nous pourraient s’inspirer.

Abordons à présent le sujet de l’intégration de ces enfants en établissements scolaires ordinaires. Dans la théorie, tout est fait pour accueillir ces enfants dans les meilleures conditions. Mais la réalité du terrain est toute autre.

Nombreuses sont les familles mal accueillies dans les écoles, nombreux sont les enseignants qui rechignent à prendre en charge un enfant différent, quand ils ne refusent pas catégoriquement de faire le moindre « effort » (comme porter un micro HF par exemple, pour permettre à un enfant sourd de mieux appréhender les directives).

Comment nous, parents, pouvons-nous -devons-nous- supporter cette attitude fort loin de la bienveillance prônée par la loi de 2005 ? Nous n’avons pas d’autre choix que de ne rien dire, pour éviter à nos enfants de subir les conséquences de nos réclamations, toutes légitimes qu’elles soient. Personnellement j’ai assisté à un colloque sur l’accueil de l’enfant handicapé en milieu scolaire, colloque qui en principe était réservé aux professionnels mais pour lequel j’avais reçu une invitation. Les personnes présentes étaient toutes enseignantes, professeurs, et que croyez-vous que j’aie pu ressentir, moi parent d’enfant handicapé, en les entendant discuter entre eux et dire à quel point c’était insupportable pour eux d’avoir de tels enfants dans leurs classes (perte de temps, gâchis d’énergie, dévalorisation de leur merveilleux métier, etc…) ? Se vanter de la façon dont ils s’y prenaient pour faire en sorte de refuser ou de mettre de la mauvaise volonté dans la prise en charge de ces enfants ?

Quand ils ont compris qu’ils parlaient à une maman d’enfant handicapée, bien sûr ils étaient un peu déconfits mais le mal était fait, et j’avais bien compris qu’ils étaient légion à penser comme eux. Après avoir entendu de telles horreurs, dans quel état d’esprit pensez-vous que nous sommes lorsque nous confions nos trésors à des personnes dont nous ne savons pas comment elles vont les traiter ? A des personnes qui sont dans le jugement au lieu d’être dans la bienveillance.

Voilà ce que je souhaitais vous dire, au nom d’une majorité de familles qui se taisent et acceptent cette maltraitance parce que si elles ont le malheur de faire valoir leurs droits et ceux de leur enfant à un accueil bienveillant, elles savent qu’il y aura des représailles et que c’est leur enfant qui en paiera le prix.

J’ai bien quelques idées pour faire bouger les choses, et pour qu’un meilleur accueil soit réservé à ces enfants différents dans les écoles de la République. Il est urgent d’agir, car le monde de demain est dans les mains de nos enfants, et quel meilleur endroit pour les faire grandir dans l’harmonie et la tolérance, que l’école de la République ? L’école qui est censée porter toutes les valeurs de la charte des droits de l’Homme.

Merci de m’avoir lue jusque-là et je me tiens à votre disposition pour développer plus avant les idées très concrètes, faciles à mettre en œuvre et peu (voire pas) coûteuses, qui pourraient faire changer les choses.

Veuillez agréer, Madame, Monsieur, l’expression de mes salutations distinguées.

 

Sophie de Sainte Maresville / Association SASHA

AUCUN DE NOUS NE SAIT CE QUE NOUS SAVONS, TOUS ENSEMBLE (Euripide)

C’est ensemble que nous devons avancer

(*)

CAMSP : Centre d’Action Médico-Sociale Précoce

IME : Institut Médico Educatif

SESSAD : Service d’Education Spécialisée et de Soins à Domicile

SSEFS : Service de Soutien à l’Education Familiale et à la Scolarité

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